Le bail commercial

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Applicable depuis le 19 juin 2014, la loi PINEL, qui affecte le statut des baux commerciaux, a pour objectif « le maintien d'une offre commerciale et artisanale diversifiée sur les territoires ».

Elle comporte plusieurs dispositions dont la date d'application diffère, certaines dispositions applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 19 juin 2014 et les dispositions applicables pour les contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014. Elle vient modifier de manière significative certains aspects du statut des baux commerciaux et il est donc nécessaire d’en retenir 10 points-clefs.

1 - Etat des lieux obligatoire

La loi limite la liberté contractuelle dans les relations entre locataire et bailleur. Les parties ont désormais l'obligation d'établir un état des lieux d'entrée et de sortie. En cas de désaccord entre les parties, l'huissier de justice l'établira sur l'initiative de la partie la plus diligente et les frais seront partagés par moitié entre le bailleur et le locataire. Cette disposition est particulièrement utile dès lors qu’elle est de nature à éviter un certain nombre de contentieux, fréquents quant à la responsabilité du locataire quant à l’état des lieux, après un départ en particulier.

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2 - Possibilité de donner congé par lettre recommandée

Pour ce qui concerne la durée des baux commerciaux, le congé relatif à la fin du bail peut être donné par lettre recommandée avec accusé de réception ou, comme auparavant, par exploit d'huissier.

Cette mesure, décriée par la doctrine, et justifiée par le souhait de rendre les procédures moins onéreuses pour les bailleurs, est au cœur des polémiques soulevées par les lois et projets dits « macron » relatifs aux professions règlementées. La délivrance par la poste présente-t-elle les mêmes garanties que la délivrance d’un exploit d’huissier ? L’auteur ne donnera pas ici son avis – la jurisprudence sera certainement pleine d’enseignements sur la question.

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3 - Interdiction de contourner le droit de donner congé

La révision triennale à l'initiative du locataire redevient d'ordre public et la révision des loyers prendra effet à compter de la date de la demande en révision.

Par ailleurs le bailleur ne peut plus empêcher son locataire de résilier son bail à l'expiration d'une période triennale (3, 6 ou 9 ans). Cette demande était fréquente de la part des bailleurs institutionnels qui l’exigeaient souvent en contrepartie d’une réduction du prix du loyer. Le locataire acceptait alors de s’engager pour plus de trois en renonçant à donner congé à l’expiration de la première période triennale – au risque de se trouver en difficultés si le prix du loyer devenait trop lourd une fois les trois premières années dépassées…

Des exceptions perdurent: le locataire peut renoncer à son droit de résiliation anticipée et s'enfermer dans un bail ferme dans 4 cas: - bail supérieur à 9 ans ; - bail sur des locaux construits en vue d'une seule utilisation ; - bail de locaux à usage exclusifs de bureaux ; - bail de locaux de stockage.

4 - Conditions des cessions de bail assouplies

Le transfert et la cession du bail sont également assouplis. En effet, la loi vient limiter la clause de garantie solidaire du cédant. Il en résulte que le bailleur a un mois seulement à compter du non-paiement pour informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire. Cette clause de garantie ne peut être invoquée que pendant une durée de 3 ans à compter de la date de cession du bail.

En cas de liquidation judiciaire et dans l'hypothèse d'un plan de cession, le tribunal de commerce peut autoriser le repreneur à adjoindre des activités connexes ou complémentaires à celles déjà autorisées dans le bail cédé – le bailleur ne peut s’y opposer.

La loi précise également qu’en cas de transformation des sociétés, le bail commercial est transmis à la société bénéficiant de l’opération de transformation. Ainsi, en cas de fusion de sociétés ou d’apport partiel d’actif, le bail est transmis, à la société issue de la fusion ou à la société bénéficiaire de l’apport.
 

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5 - Nouveaux pouvoirs des collectivités locales

S'agissant des communes, leur droit de préemption est modifié: elles peuvent déléguer ce droit. Il est également prévu que les collectivités pourront définir des zones dans lesquelles tout locataire, où à défaut tout propriétaire, doit veiller à ce que l'aspect extérieur du local ne porte pas atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants.

Enfin, une expérimentation favorisant la redynamisation du commerce et de l'artisanat est créée pour une période de 5 ans. Elle est mise en place par des contrats de revitalisation artisanale et commerciale.

6 - Nouvelle sanction pour les clauses contraires au statut des baux commerciaux

Par ailleurs, la loi instaure une nouvelle sanction des clauses contraires à ce statut en disposant que ces clauses seront "réputées non-écrites". La sanction est donc l'inexistence juridique de ces clauses et l'absence de délai de prescription.

Jusqu’à présent, les clauses contraires aux règles d’ordre public du statut des baux commerciaux étaient soumises à la prescription biennale. Le jeu de cette prescription pouvait s’avérer cruel pour les preneurs puisque passé le délai de 2 ans, il n’était plus possible d’attaquer ces clauses.

7 - Définition légale des conventions d’occupation précaire

La loi PINEL donne une définition légale de la convention d'occupation précaire. Elle se caractérise, qu’elle que soit sa durée, "par le fait que l'occupation des lieux n'est autorisée qu'à raison de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties". La précarité peut être constituée, à titre d'exemple, par un projet de démolition, de reconstruction, ou par la réalisation de travaux d'aménagements.

La durée du bail dérogatoire est allongée, sa durée maximale passant de 2 ans à 3 ans. A l’issue des trois années susmentionnées, les parties disposeront d’un délai d’un mois pour manifester le désir d’échapper au statut légal des baux commerciaux, alors qu’avant la loi, à l’expiration de la durée maximale du ou des baux dérogatoires, le simple maintien du locataire commercial dans les lieux et sans opposition du bailleur avait pour conséquence la naissance d’un nouveau bail régi par le statut des baux commerciaux

Ces dispositions applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 19 juin 2014.

8 - Plafonnement des augmentations de loyers

La loi prévoit que le loyer peut être révisé ou renouvelé selon l'ILC (indice des loyers commerciaux) et l'ILAT (indice des loyers des activités tertiaires). C’est donc la fin annoncé de l’ICC - indice du coût de la construction – bien que la loi prévoit que le recours à l’ICC demeurera possible dans certains cas.

Pour les contrats en cours faisant référence à l’ICC, les parties devront se mettre en conformité avec la loi en lui substituant l’un de ces deux indices lors du prochain renouvellement et non pas lors de la prochaine révision.

Les excès et les abus lors de la fixation du bail révisé ou renouvelé sont également contrôlés : il est instauré une limite annuelle de 10% aux augmentations de loyer acquitté au cours de l'année précédente.

C’est l’un des aspects les plus sensibles de la loi puisque ce plafonnement s’appliquera même en cas de modification notable des éléments constitutifs de la valeur locative mentionnés aux 1° à 4° de l’article L 145-33, c’est-à-dire en cas de modification de la « commercialité » - à savoir les éléments affectant les caractéristiques du local, la destination des lieux, les obligations des respectives des parties et les facteurs locaux de commercialité.

La loi a également étendue la compétence de la commission départementale de conciliation. En plus des litiges relatifs au déplafonnement, la commission est aussi compétente pour les litiges relatifs au montant du loyer, ainsi qu'aux charges et aux travaux.

9 - Meilleure répartition des charges

Le bail devra comporter un inventaire précis et limitatif des charges, impôts, taxes et redevances. Ces charges devront être réparties entre le bailleur et le locataire selon la surface exploitée.

Ces impôts refacturés au locataire doivent correspondre strictement au local exploité et à la quotepart des parties communes nécessaire à l'exploitation de la chose louée. En outre, le décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014 est venu apporter une liste de charges qui ne pouvaient, en aucun cas, être imputées au locataire.

Le bailleur a, en plus, une obligation d'information sur les travaux prévisionnels et réalisés : il doit communiquer au locataire, lors de la conclusion du bail, puis tous les 3 ans, un état prévisionnel des travaux qu'il a réalisés dans les 3 années précédentes en précisant leur coût, de même que les travaux envisagés dans les 3 années suivantes assorti d'un budget prévisionnel.

Ces dispositions sont applicables pour les contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014

10 - Droit de préemption du locataire

La loi crée un droit de préemption au profit du locataire en cas de vente des murs dans lequel le fonds de commerce est exploité, mais ce droit est, en réalité, restreint car il connaît de nombreuses exceptions.

Le législateur n’a donc pas osé aller trop loin : cette disposition n’est pas d’ordre public, et les parties pourront y déroger.

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